Apprendre à m'aimer

Il y a quelques mois, après de longues années de conflit,  je signais l'armistice avec mon corps. Alors que sonnait l'heure du régime avant l'été, que les magazines et les publicités nous rappelaient l'échéance imminente, je prenais la décision d'en finir. D'en finir avec ce stress, cette peine, cette autoflagellation. Et maintenant que j'ai sauté le pas, que j'ai pris ce chemin et entamé ce processus, qu'est-ce que ça fait du bien ! Mon corps va mieux.  Pas encore tout à fait en paix, des années de souffrance ne peuvent s'effacer en un revers de main, mais il va mieux et je le ressens. Je le redécouvre, accepte d'en voir les contours, les défauts, les qualités, de le regarder tel qu'il est et non tel qu'il devrait être. Selon qui et selon quoi d'ailleurs ? Qui a le droit d'avoir un tel pouvoir ? Alors oui je ne rentre toujours pas dans une taille 38, oui j'aimerais perdre quelques kilos pour des questions de santé, mais doucement à mon rythme et avec plaisir. Cela prendra le temps que ça prendra peu importe, je n'en suis plus là, je ne rêve plus du corps des autres, je rêve de leur bien-être quelque soit leur tour de taille. Car oui accepter son corps ne signifie pas se laisser aller, au contraire, j'ai envie d'en prendre soin, de manger mieux, de faire un peu de sport, mais sans excès et surtout sans rêves inaccessibles. Mon corps n'a pas changé, c'est juste moi. J'ai changé de perspective, j'ai grandi et pris du recul. Aujourd'hui j'accepte de voir la beauté là où avant je ne voyais que graisse et bourrelets. Mon Dieu, que j'ai été dure avec moi-même...

Et puis je pense à ma fille, à ce petit bout, à cette future femme. Je veux être pour elle un exemple et non une honte.  Je veux lui donner des valeurs, et surtout lui apprendre l'importance de l'estime de soi. "Oui chérie, maman est ronde mais maman est belle." J'espère qu'elle n'aura pas les problèmes de poids que j'ai connu, non pas par un esthétisme fou mais juste pour lui épargner ces années de souffrance qui me laissent encore aujourd'hui de profondes cicatrices. J'aimerais qu'elle se sente bien dans sa peau et que son corps ne soit pas une source d'angoisse ou pire de dégoût.

Pour ma part, j'en ai fini de vouloir ressembler à une autre. J'ai enfin décidé de faire la rencontre de moi-même et d'apprendre à l'aimer cette elle que j'ai tant rejeté. Des personnes autour de moi ont remarqué un changement, notamment dans la manière de m'habiller. Aujourd'hui j'ose. Je me permets des choses banales que je m'interdisais bêtement comme porter de la couleur, des robes, des shorts, des talons. Je me fais plaisir et essaie de le mettre en valeur ce corps qui est le mien. Et puis chose nouvelle, je me prends en photos. Moi qui détestais être prise en photos, je me soigne aujourd'hui par l'objectif. Je l'apprivoise et petit à petit apprivoise mon image. Et finalement, je me rends compte que non je ne suis pas si horrible que ça, que me formes ne sont pas si laides, qu'elles sont même parfois sexy, que je peux être moi aussi jolie. La blogosphère a d'ailleurs était très inspirante de ce point de vue là.

Alors il y a toujours des jours sans où je ne suis pas toujours au top, où mes anciens démons essaient de reprendre le dessus mais au fond je sais que ce n'est pas une question de poids mais une question de moi. Apprendre à s'aimer n'est pas chose aisée. L'armistice est signé. Mon corps et surtout mon estime sont en reconstruction, et un jour, je me le promets, je connaîtrais la paix.